9 October 2024

La TCRI dénonce l’évitement délibéré du gouvernement face à ses obligations découlant de la Charte des droits et libertés

Les organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes sont outrés des solutions avancées par le Premier ministre du Québec relatives à la création de « zones d’attente » ou à la répartition obligatoire des personnes en demande d’asile qui se trouvent déjà au Québec.

Montréal, le 9 octobre 2024. En réponse à l’arrivée et à la présence des personnes en demande d’asile au Québec, le Premier ministre propose soit de s’inspirer des zones d’attentes françaises pour créer des lieux d’enfermement aux différents points d’entrée du pays, où elles y seraient systématiquement détenues, ou alors de déplacer de force la moitié de celles qui se trouvent au Québec ailleurs au Canada.

La TCRI dénonce fortement ces propositions, alors que le Premier ministre avoue lui-même ne pas avoir l’intention d’analyser les effets de ces mesures sur les droits fondamentaux. En France, les impacts négatifs des zones d’attente sur les personnes en demande d’asile ont été documentés, tant au chapitre de l’accès au droit et à la justice que des conditions de vie déplorables. Au surplus, la suggestion qu’il est possible et raisonnable de déraciner des personnes qui se sont établies au Québec après avoir déjà été contraintes de fuir leur foyer trahit un grand manque d’humanité et reflète une sous-estimation des enjeux, indiquant une incapacité à saisir pleinement leur ampleur.

« Les propositions du Premier ministre sous-tendent que les personnes en demande d’asile ne jouiraient pas des mêmes droits que les autres êtres humains au Québec. Elles sont déshumanisantes et il s’agit d’un précédent inquiétant et dangereux. Ce sont de personnes dont on parle, pas du bétail! », précise la coprésidente de la TCRI, Sarah Toulouse.

La TCRI exhorte le Premier ministre et les membres du gouvernement à cesser de tenir des discours qui font des personnes immigrantes des boucs émissaires pour toute une série de problèmes au Québec. D’une part, ces discours sont dangereux en ce qu’ils attisent les sentiments xénophobes et anti-immigration, ce que constatent les organismes sur le terrain. Ils nuisent non seulement aux personnes immigrantes et réfugiées, mais aussi à la cohésion de l’ensemble de la société, en normalisant des comportements discriminatoires. Malheureusement, le gouvernement affaiblit la cohésion sociale et contribue à la marginalisation des personnes concernées. D’autre part, ils sont largement trompeurs. Les problèmes que connaît le Québec en matière de logement, d’éducation ou de santé ont des racines beaucoup plus complexes et profondes. Comme le démontrent les études, ces défis sont enracinés dans des structures économiques, politiques et sociales plus larges et ne peuvent pas être attribués à une seule cause.

Par exemple, il est faux de prétendre que l’on peut régler la crise du logement en diminuant de moitié le nombre de résidents temporaires et de personnes en demande d’asile. Ces discours trahissent en outre un certain mépris pour les personnes qui souffrent de ces problèmes en ne proposant aucune véritable solution.

« Le Premier ministre réaffirme souvent que la nation québécoise est accueillante. Pourtant, les discours qui tendent à associer les défis du Québec aux personnes immigrantes et réfugiées nourrissent une perception inverse. Il est essentiel que le Premier ministre prenne conscience que derrière les termes ‘immigrants’ et ‘demandeurs d’asile’ se trouvent des hommes, des femmes et des enfants, souvent en situation de grande vulnérabilité, qui n’ont eu que très peu de choix dans le parcours difficile qu’ils traversent aujourd’hui. Il est crucial de ne pas chercher à obtenir des gains politiques sur le dos de ces personnes, mais plutôt de mettre en avant les valeurs de respect et de compassion qui définissent notre société », affirme Manel Rekik, coprésidente de la TCRI.

Des solutions existent pour que le Québec cesse de subir les contrecoups d’un accueil mal coordonné alors que les déplacements forcés atteignent des sommets inégalés dans le monde. Les organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes demandent au gouvernement du Québec de prendre acte de ces nouvelles réalités, de poursuivre dans la voie de la solidarité envers les personnes déplacées et de mettre en œuvre des solutions pérennes en impliquant l’ensemble des parties prenantes, dont les organismes communautaires.