14 December 2023
Retour sur le salon de l’emploi pour les personnes demandeuses d’asile
Il est 9h ce lundi 4 décembre 2023. Montréal depuis hier, s’est habillée de son plus beau manteau de neige, le premier de l’hiver. Outre les défis de mobilité que ce manteau épais peut impliquer (le temps que la ville se remette en selle pour arriver à le maitriser), il fait très froid dehors, et il faudra prendre son mal en patience avant de pouvoir entrer dans le Plaza Antique qui abrite aujourd’hui la nouvelle édition du Salon de l’emploi destiné aux personnes demandeuses d’asile, salon présenté par l’organisme INICI. En effet, la file d’attente est longue: des centaines de personnes se sont déplacées ce matin pour espérer un virage professionnel dans leur expérience de vie, ici au Québec.
Dans la file, Bertin, jeune homme de 28 ans en provenance du Burkina Faso, est arrivé il y a trois semaines par avion. C’est grâce à sa voisine de hublot qu’il a entendu parler du salon de l’emploi. Il vient ici en repérage professionnel, dans l’optique de recevoir bientôt, si tout vas bien, son permis de travail, qui lui permettra dans un premier temps de se loger, de se nourrir et de se vêtir: « Pour l’instant, mon ami m’héberge chez lui, en attendant que je trouve un travail. Ici, j’aimerais bien être conducteur d’engin poids lourd, comme je faisais chez moi au Burkina Faso ».
Il est 10h et nous rentrons enfin à l’intérieur: la salle est déjà comble et nous arrivons en pleine intervention orale de la ministre québécoise de l’Emploi, Kateri Champagne Jourdain, qui ouvre le bal en rassurant les participants qu’aujourd’hui, repartir avec un contrat, c’est possible. Elle annonce d’ailleurs le lancement du projet pilote visant à faciliter l’embauche de personnes demandeuses d’asile dans le secteur de la santé, alors que ce secteur subit une pénurie de main-d’œuvre assez inédite: « De nombreux demandeurs d’asile détiennent un permis de travail et souhaitent contribuer à la société québécoise en occupant un emploi. Avec la pénurie de main-d’œuvre actuelle, entre autres dans le secteur de la santé, c’est important de mettre des outils en place pour faciliter leur embauche dans certains emplois en forte demande », a déclaré la ministre.
Les énergies de l’espoir et de la détermination sont bien palpables dans la salle. On peut déjà observer des personnes remplir soigneusement des formulaires de candidatures auprès des employeurs dans la salle. À midi, l’un d’entre eux n’avait même plus assez de formulaires à fournir tellement la demande était importante.
Parmi les employeurs, nous avons fait la connaissance d’Eliott, conseiller en ressources humaines pour l’entreprise CVert, qui offre des services d’entretien de pelouse dans les quartiers résidentiels de Saguenay à Québec, en passant par Sherbrooke et Montréal: « On est là pour recruter les techniciens pour la saison 2024. Selon nous, l’inclusion, c’est donner la chance à tout le monde, peu importe le statut d’immigration, l’origine ou la situation de vie. On fait en sorte d’organiser des aménagements de poste selon les besoins de nos personnes salariées, par exemple si l’une d’entre elle présente un handicap ou si elle a des enfants à s’occuper, on sait faire preuve de flexibilité. Le seul pré-requis pour travailler avec nous, c’est d’avoir le permis de conduire, car le métier de technicien chez Cvert implique des déplacements pour se rendre chez les personnes utilisant nos services ».
En parlant de flexibilité, nous avons aussi croisé Macdaline. Outre le fait d’être une personne demandeuse d’asile, Macdaline est avant tout une femme, mère monoparentale, originaire d’Haïti et parallèlement ambassadrice pour notre organisme membre, INICI. Elle nous partage: « J’ai un enfant et ce n’est pas beaucoup d’entreprises qui considèrent le travail et la vie de famille. Beaucoup disent qu’ils le font mais dans les faits, pas vraiment. Moi, j’ai besoin d’un travail qui concilie ce que je vis comme mère monoparentale. Le service de garde commence à 6h45 et je dois prendre le travail à 7h. Heureusement, mon travail actuel de préposée au bénéficiaire accepte que je rentre après avoir déposé mon enfant. Mais aujourd’hui, j’aimerais retourner dans mon domaine de prédilection, c’est à dire celui d’assistante administratif comptable, et c’est ce que je viens chercher au salon de l’emploi ».
L’édition 2024 du Salon de l’emploi destiné aux personnes demandeuses d’asile est une fois de plus un succès, qui témoigne non seulement de la résilience de ces personnes dans leur parcours migratoire – qui, pour rappel, ont utilisé leur droit d’asile car gravement menacé dans leur pays d’origine – et qui traduit une détermination sans faille de ces personnes à reprendre le cours de leur vie, dans les meilleures conditions possibles, à condition d’être accueilli dignement par la société d’accueil et par le marché de l’emploi.
Un grand bravo à l’organisme INICI pour l’organisation de ce salon, d’une utilité prouvée haut la main, et à l’année prochaine!