10 June 2025

PL C-2 : Ce qu’il faut savoir

Le gouvernement fédéral a déposé le 3 juin 2025 le projet de loi C-2 (Loi visant une sécurité rigoureuse à la frontière), présenté comme un renforcement de la sécurité à la frontière canado-américaine. En plus de restreindre fortement l’accès au droit d’asile, cette réforme octroierait de vastes pouvoirs aux autorités migratoires, pouvoirs qui permettraient de suspendre en masse l’examen de certaines demandes d’immigration ou d’annuler ou modifier différents documents d’immigration. La TCRI s’oppose fermement aux mesures du projet de loi C-2 qui représentent une attaque contre le droit d’asile et les principes fondamentaux du droit international.

Enjeux principaux soulevés

Le projet de loi C-2 soulève des préoccupations majeures pour les personnes migrantes, particulièrement celles qui demandent l’asile. Le gouvernement propose des mesures qui risquent d’exclure des personnes vulnérables d’importantes formes de protection.

Restriction du droit d’asile : le projet de loi introduit deux nouveaux motifs d’irrecevabilité. D’une part, une demande sera jugée irrecevable si elle est déposée plus d’un an après l’entrée au Canada, et ce, depuis le 24 juin 2020. Le délai court depuis la première entrée après cette date et non après la date de la dernière entrée. D’autre part, une demande d’asile déposée plus de 14 jours après une entrée irrégulière par la frontière terrestre sera maintenant jugée irrecevable, à l’instar des demandes présentées moins de 14 jours après une telle entrée. La personne ne sera toutefois pas retournée aux États-Unis; elle n’aura accès qu’à l’Examen des risques avant renvoi (ERAR).

  • Ces délais ne tiennent pas compte des réalités vécues par les personnes migrantes (trauma, précarité, manque d’accès à l’information ou à un soutien juridique, entre autres);
  • Les nouvelles règles s’appliqueraient dès le 3 juin 2025, soit avant même l’adoption officielle du projet de loi. Cela signifie que des personnes ayant déposé une demande en toute légalité pourraient la voir jugée irrecevable rétroactivement;
  • Les personnes dont la demande serait ainsi jugée irrecevable n’auraient accès qu’à l’ERAR, une procédure qui n’offre pas les mêmes garanties que la procédure de détermination du statut de réfugié et dont les taux d’approbation sont extrêmement bas (de 2% à 4% environ).

Nouvelle étape dans le processus de demande d’asile : le projet de loi introduit un examen complémentaire entre l’examen de la recevabilité de la demande d’asile et la détermination du statut de réfugié par la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (CISR). IRCC sera chargé de cet examen et rassemblera les renseignements et documents relatifs à la demande d’asile. Il aura le pouvoir de revenir sur la décision de recevabilité ainsi que de demander à la CISR de se prononcer sur le désistement de la demande d’asile. Ces nouveaux pouvoirs soulèvent plusieurs préoccupations quant à l’accès à une procédure équitable, d’autant plus que de nombreux détails doivent encore être déterminés par règlement.

Pouvoirs gouvernementaux accrus : le projet de loi permettrait au gouvernement de suspendre en masse certaines demandes ou d’annuler des documents migratoires, au nom de « l’intérêt public », sans les obligations de transparence habituellement liées à l’adoption de décrets gouvernementaux.

Risques liés au partage de données : la loi faciliterait les échanges d’informations personnelles entre IRCC, d’autres agences fédérales ou provinciales et les forces de l’ordre, sans garanties suffisantes pour la protection des droits.

Confusion des enjeux migratoires et sécuritaires : en amalgamant immigration, asile et lutte contre le crime organisé, le projet de loi renforce la perception des personnes migrantes comme une menace, et justifie une approche répressive plutôt qu’humanitaire.

Position de la TCRI

La TCRI s’oppose fermement aux mesures du projet de loi C-2 qui représentent une attaque contre le droit d’asile et les principes fondamentaux du droit international.

Messages clés
  • Ce projet de loi compromet gravement le droit d’asile au Canada.
  • On ne peut sacrifier les droits fondamentaux sous prétexte de sécurité frontalière.
  • Lier migration et criminalité entretient des préjugés dangereux.
  • Des personnes risquent d’être expulsées vers des pays où leur vie est en danger.
  • Nous demandons au gouvernement de respecter le droit d’asile et ses obligations internationales relatives au droit d’asile.
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