19 December 2024
Reconnaitre l’apport des migrant.e.s et lever les obstacles qui se dressent devant eux
Depuis 1979, la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes (TCRI) est témoin des efforts et des sacrifices incommensurables que déploient les personnes qui choisissent le Québec comme terre d’accueil et les organismes qui les accompagnent. Qu’elles soient des personnes réfugiées, des personnes avec une résidence permanente, un statut précaire ou sans statut, elles font face à de nombreux défis tout au long de leur parcours, marqué d’embûches, de persévérance, de courage, de victoires, et des multiples émotions qui s’ensuivent.
En cette Journée internationale des migrants, le 18 décembre, il est essentiel de mettre en lumière le véritable visage de l’immigration et la contribution des personnes immigrantes et réfugiées à notre société, afin de réagir aux discours réducteurs, et trop souvent trompeurs, véhiculés dans la sphère publique.
Un parcours semé d’embûches
En 2016, Pablo (nom fictif), une personne immigrante du Salvador, arrive au Québec pour rejoindre sa conjointe. Même si l’espagnol est la seule langue qu’il maîtrise à son arrivée, il compte bien apprendre le français pour s’établir convenablement. Les vicissitudes des premiers temps sont assez ardues, mais la volonté de s’en sortir est une force à ne pas négliger. Quelques semaines plus tard, il décroche son premier emploi.
C’est dans le cadre d’un projet de lutte contre le racisme que Pablo nous raconte son histoire, dans un français largement compréhensible. Sa première expérience d’emploi se transforme peu à peu en une situation intenable, marquée par un traitement discriminatoire et des remarques faisant référence à ses origines, des propos pouvant être perçus comme racistes. Cette expérience fait écho à une étude de l’Observatoire des inégalités raciales au Québec, qui affirme que 53,4 % des personnes immigrantes résidant dans la province disent avoir subi de la discrimination dans leur emploi actuel.
Il n’est guère surprenant d’apprendre que Pablo finit par quitter son emploi après avoir été ciblé par de multiples propos discriminatoires et racistes. Ce qui est surprenant, en revanche, c’est la durée pendant laquelle il endure cette situation : plus d’un an.
Des barrières systémiques
Le cas de Pablo ne représente qu’un fragment parmi la myriade d’histoires vécues par les personnes immigrantes et réfugiées, souvent confrontées à divers obstacles. Si vous êtes, par exemple, une personne en demande d’asile, vous ne bénéficiez pas de la Régie de l’assurance maladie du Québec, mais plutôt du Programme fédéral de santé intérimaire (PFSI). Cependant, seules certaines personnes professionnelles et certaines cliniques acceptent le PFSI. Si vous êtes une travailleuse étrangère ou un travailleur étranger temporaire avec un permis fermé, vous dépendez entièrement de votre employeur, car il est impossible de changer d’emploi.
Ce système favorise des formes contemporaines d’esclavage selon un rapport de l’Organisation des Nations unies. Si vous êtes une personne sans statut, votre situation est invivable, vous obligeant à vivre dans l’ombre par crainte d’être déporté.
Il n’est donc pas surprenant de constater que le système d’immigration et les dispositions juridiques qui l’encadrent engendrent des problèmes, érigent des barrières et perpétuent les inégalités que subissent des personnes déjà en situation de précarité. Si vous ajoutez tous les changements de seuils, de lois, de programmes et les propos contradictoires de nos gouvernements, vous comprendrez que le parcours migratoire devient un labyrinthe complexe, où confusion et incertitude amplifient les défis rencontrés. Le comble est que les changements annoncés au cours des derniers mois risquent d’accroître le nombre de personnes sans statut.
Un apport considérable à notre société
Ce qui suscite l’admiration dans le parcours de Pablo, c’est sa détermination à persévérer. Aujourd’hui, il travaille dans un organisme communautaire en région. Ayant surmonté de nombreux obstacles et appris le français, il est au service de la communauté et aide les personnes nouvellement arrivées au Québec.
D’autres personnes immigrantes trouvent également leur voie et apportent une contribution considérable à la société québécoise, que ce soit dans le réseau de la santé, le système d’éducation, les entreprises locales, le milieu communautaire, et bien plus encore.
À titre d’exemple, en 2015-2016, Statistique Canada rapporte que 189 405 personnes immigrantes occupent un emploi dans une profession infirmière ou d’aide aux soins de santé, représentant 28 % des effectifs dans ces secteurs. Plus récemment, le recensement de 2021 révèle que les personnes immigrantes représentent le quart des personnes travaillant dans le réseau de la santé.
Ces parcours nous rappellent qu’en cette Journée internationale des migrants, nos gouvernements ont le devoir d’offrir un accueil empreint de dignité, de lever les obstacles à leur intégration, de valoriser leur apport considérable et de bâtir un Québec inclusif, à la hauteur de nos valeurs.